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Société en participation de médecins : la lettre recommandée pour se séparer ?

Civil - Contrat
Affaires - Sociétés et groupements
05/12/2019
La dissolution d’une société en participation à durée indéterminée et à caractère civil notifiée par LRAR est irrégulière.
La société en participation (SEP), structure sans personnalité morale, simple à constituer et souple de fonctionnement, sert régulièrement de cadre juridique à une collaboration entre des professionnels libéraux. Sa durée peut être limitée ou illimitée. Ces SEP de professions libérales sont régies par les articles 22 et 23 de la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990, et les dispositions « non contraires » des articles 1871-1 à 1872-1 du Code civil. La dissolution est un moyen de mettre un terme à un litige entre les associés, mais la Cour de cassation, dans un arrêt du 27 novembre 2019, rappelle qu'elle est encadrée.

Faits et procédure. - Cinq chirurgiens – orthopédistes, exerçant au sein d’une SEP, agréent un autre médecin Y. ayant acquis des parts sociales. À la suite de différends, quatre de ces cinq médecins lui notifient leur décision de dissoudre la société, sur le fondement de l’article 1872-2 du Code civil.
Le médecin Y. les assigne aux mêmes fins, en constatation du caractère abusif de la dissolution, en désignation d’un mandataire ad hoc et en paiement de diverses sommes à titre de dommages et intérêts.
En appel, les quatre médecins sont condamnés solidairement à payer au médecin Y. des dommages et intérêts pour un montant de 225 000 euros, en réparation de ses préjudices matériel et moral, les juges du fond décidant que la dissolution était irrégulière. Ceux-ci se basent sur l’article 22 de la loi du 31 décembre 1990 précitée qui ne permet pas aux associés d’une SEP d’exercice libéral de dissoudre la société par voie d’une notification adressée par l’un d’eux à tous les associés. Ils se pourvoient en cassation.

Solution. - La Haute juridiction rejette la demande des quatre médecins. Aux termes de l’article 22 précité, elle rappelle qu’« il peut être constitué entre personnes physiques exerçant une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé une société en participation, régie par les dispositions qui suivent ledit article 22, alinéa premier, et celles non contraires des articles 1871 à 1872-1 du Code civil ».
Elle ajoute qu’il résulte de l’article 1871-1 du même Code, qu’à moins qu’une organisation différente n’ai été prévue, les rapports entre associés sont régis, en tant que de raison, par des dispositions applicables aux sociétés civiles, si la société a un caractère civil. Selon l’article 1846-1 de ce Code, les sociétés civiles prennent fin dans les cas visés à cet article ainsi qu’à l’article 1844-7.

La cour d’appel a donc retenu à bon droit que l’article 1872-2 selon lequel, lorsque la société en participation est à durée indéterminée, sa dissolution peut résulter à tout moment d’une notification adressé par l’un d’eux à tous les associés, pourvu que cette notification soit de bonne foi, et non faite à contretemps, n’était pas applicable à la société. Elle a relevé qu’aucune disposition du règlement intérieur de la société n’était relative à sa dissolution. Elle en a exactement déduit, qu’en application de l’article 1871-1 du Code civil, l’article 1844-7 du même Code, qui énonce les huit cas dans lesquels les sociétés civiles prennent fin (décision unanime des associés, dissolution judiciaire à la demande d’un associé pour juste motif, etc.), était applicable à celle-ci.

La Cour de cassation rappelle ici, d'une part, que la société est d'abord un contrat auquel on ne peut mettre fin de n'importe quelle façon et, d'autre part, que c'est la loi du 31 décembre 1990 qui prévaut. Dans l'affaire jugée ici, l'un des associés n'avait pas participé à la "procédure" de dissolution.
 
Source : Actualités du droit